mardi 20 octobre 2009

Et vous ?... II (Fiction Yaoi) - Chapitre 04


Il me paraissait si seul. Quelque part, il me faisait mal au cœur. Je ne savais pas vraiment pourquoi j’étais allé le voir mais je n’avais pas pu m’en empêcher. Peut-être était-ce par pitié ? Ou peut-être parce qu’il m’intriguait ?
Assis sur un banc, il lisait un livre épais en écoutant de la musique comme presque à chaque fois que je le voyais. Je me postai devant lui et attendis qu’il me remarquât. Il était trop concentré sur sa lecture pour se faire. Je donnai un léger coup à son pied suspendu dans les airs du fait de ses jambes croisés. Il leva les yeux sur moi, étonné. Puis, encore une fois, il eut ce sourire lubrique qu’il affichait lorsqu’il me rencontrait. Je lui répondis d’une risette timide.
« Comment ça va ton frère ? » demandai-je pour entamer la conversation.
Je m’assis à côté de lui afin de ne pas lui faire face, portant mon regard au loin. Il ôta ses écouteurs avant de me répondre.
« C’est de mon frère que tu veux parler ? J’espérai autre chose. »
Il posa une main sur ma cuisse, et je sursautai. Il retira sa main. Du coin de l’œil, je le vis sourire à nouveau, mais cela voulait dire tout autre chose.
« Ha, je vois. Pas en public.
Pourquoi tu es toujours seul ? » demandai-je pour détourner la conversation.
« Parce qu’avant, je n’avais jamais eu besoin d’avoir des amis. »
Je fus surpris par tant d’honnêteté. Pour ma part, je n’aurais jamais pu dire une chose pareille à quelqu’un, bien que je ne comprisse pas ce que cela signifiait.
« Qu’est-ce que tu veux dire ?
Avant, mon frère était toujours avec moi. On n’avait pas vraiment d’amis. On était tout les deux et ça nous suffisait. Maintenant, il n’est plus là. Je suis tout seul.
Mais pourtant tu étais bien avec des amis, l’autre soir. »
Il se tourna légèrement vers moi et se pencha vers mon oreille, me caressa le cou. Je frissonnai.
« Tu parles de ce soir-là ? » me murmura-t-il.
Je me levai d’un bond et lui fis face. Mes joues s’étaient empourprées. Les battements de mon corps avaient accéléré. Les souvenirs de cette fameuse nuit m’étaient revenus en mémoire et l’excitation tant redoutée m’avait envahi.
« Écoute. J’étais bourré et ça ne se reproduira pas, d’accord ? Je ne suis pas gay. Mais ça nous empêche pas d’être pote.
Ouais. J’vois l’genre. Je veux pas de ta pitié. Donc, fous-moi la paix, » répondit-il en se levant à son tour.
C’est pas de la pitié.
Alors c’est quoi ? Tu veux pouvoir me baiser à chaque fois que l’envie t’en prend en pouvant être sûr que dès le lendemain tu pourras dire : ̏Je ne suis pas gay. C’était une connerie.̋  Parce que franchement, de ça non plus j’en veux pas. Quand je t’ai sucé l’autre soir, c’était parce que j’en avais envie, ok ? Et je ne pensais pas te revoir un jour. Je te demande pas non plus de me jurer un amour éternel. Tout ce que je voulais c’était me divertir un peu. Si ça t’intéresse pas, pas besoin de venir me voir. »
Je restai interdit par son long discours. Il avait légèrement élevé la voix et j’espérai que personne que je connusse ne l’eût entendu. Sans rien ajouter – d’un autre côté, il en avait assez dit – il s’en alla et je ne fis rien pour le retenir.
Toutefois, au fond de moi, je savais que ce n’était pas fini. Je ne pouvais m’empêcher de penser à lui et espérais fermement qu’en faire un ami m’empêcherait de l’imaginer nu entre mes bras. J’avais le sentiment d’avoir besoin de lui dans ma vie. Je savais que j’étais ridicule, que toutes les raisons que j’avançais n’étaient pas cohérentes. Pourtant, j’étais certain que je ne pourrai m’empêcher de l’approcher à nouveau. J’ignorai encore ce que j’attendais de lui, mais la nécessité d’être auprès de lui – quelle qu’en fut la raison – grandissait en moi. Ce fut pourquoi je retournai à l’hôpital quelques jours plus tard, en espérant l’y voir.
Depuis notre dispute, je ne le voyais plus à l’université et son visage me manquait, même si je ne voulais pas me l’avouer. Lorsque j’entrai dans la chambre de son frère, il n’y avait personne, pas même le comateux. J’arrêtai une infermière qui passait dans le couloir.
« Excusez-moi. Où est le jeune homme qui se trouvait dans cette chambre ?
­- Vous êtes de la famille ? » me demanda-t-elle, le visage grave.
« Non, un ami.
Écoutez. Je n’ai normalement pas le droit de vous dire ça, mais il est en chirurgie.
Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Un hématome sous-dural s’est formé.
Qu’est-ce que ça veut dire ?
Il a une poche de sang dans la boîte crânienne qui fait pression sur le cerveau, » m’expliqua-t-elle, gentiment. « On a dû l’opérer pour enlever le sang.
Ok. Merci. »
Je ne savais pas réellement l’état de gravité de la situation mais au ton que la jeune femme avait employé je me doutais qu’il s’agissait d’un problème sérieux. Le magnifique visage en pleurs de mon amant d’une nuit me traversa l’esprit. Il fallait que je le visse. Je voulais être près de lui. J’avais besoin de m’assurer qu’il allait bien. L’infirmière me fit un signe de tête condescendant et fut sur le point de partir, mais je la retins.
« Attendez ! Vous n’auriez pas vu son frère ?
Il est devant la salle d’opération. »
Je l’interrogeai du regard.
« Vous prenez l’ascenseur jusqu’au deuxième étage et vous suivez la ligne rouge.
D’accord. Merci. »
Je fis volte face et me mis à courir vers l’ascenseur. J’appuyai sur le bouton jusqu’à ce que l’élévateur arrivât. Je me précipitai à l’intérieur et pressai le bouton du deuxième étage avec frénésie. Dès que les portes s’ouvrirent, je repérai la ligne rouge et la suivis en courant. Quelques secondes plus tard, je tournai dans un couloir et le vis adossé à un mur entrain de se ronger les ongles. Je ne fis pas attention au couple de quinquagénaires assis en face de lui. Je m’approchai et posai une main amicale sur son bras.
« Hé ! » fis-je pour lui signaler ma présence.
Il leva des yeux étonnés vers moi.
« Qu’est-ce que tu fais là ? » demanda-t-il sans une once de reproches dans la voix, uniquement de la surprise.
« J’étais passé te voir à la chambre de ton frère puisque je ne te voyais plus sur le campus, et une infirmière m’a expliqué ce qu’il se passait. Je voulais savoir comment tu allais.
« Merci, » dit-il en m’enlaçant.
Je le laissai faire. Il n’y avait aucune ambigüité dans ses gestes. Il cherchait juste du réconfort et n’ayant aucun ami, il se contentait de moi. Je le serrai dans mes bras. Il lova sa tête dans mon cou. Je lui caressai les cheveux. Par-dessus son épaule, je vis que le couple nous observait avec abasourdissement. Je compris qu’il s’agissait des parents de mon mystérieux amant. Je leur fis un sourire timide.
« Bonjour, » dis-je à leur attention.
Le jeune homme auburn se décolla de moi et je sentis un froid m’envahir.
« Désolé, » fit-il. « Je te présente mes parents. Papa, maman, voici…
Benjamin, » m’empressai-je de préciser, ne sachant pas s’il connaissait mon nom. « Enchanté. »
Je tendis la main et l’homme aux cheveux poivre et sel se leva et la prit.
« De même, » fit-il maussade. « Je… nous sommes surpris, nos fils n’ont pas l’habitude de nous présenter des amis.
Papa ! »
Où vous êtes vous rencontré ? » demanda l’homme.
Je ne sus quoi répondre.
« À la fac. On a des cours en commun, » répondit son fils sans ciller.
Je hochai la tête pour confirmer ce mensonge éhonté.
« Bien. Nous sommes heureux de voir que notre fils se décide enfin à sortir de sa coquille.
Ouais, c’est ça. Maman, tu veux quelque chose à boire ou à manger ? Je vais essayé de trouver un distributeur. »
Elle secoua négativement de la tête pour répondre. On la sentait fragile et sur le point de fondre en larmes. L’homme se rassit à ses côtés et entoura ses épaules d’un de ses bras.
« Allez-y, les garçons. Je m’occupe de ta mère, » fit ce dernier d’un ton paternel.
Le jeune homme s’éloigna et je le suivis.
« Au fait, comment tu t’appelles ? » demandai-je lorsque nous fûmes hors de portée.
« Roland. »
Je hochai la tête. Je ne savais pas réellement quoi lui dire. Cependant, une question me taraudait l’esprit et j’osai la lui poser.
« Et tes parents, ils sont au courant pour toi ?
« Quoi ? Que je suis pédé ? Oui. Je leur ai dit. Mais t’inquiète pas, je préciserai bien que tu n’es pas ce genre de relation.
« Réagis pas comme ça, s’il te plaît. Je sais que ça ne me regarde pas. J’étais juste curieux, d’accord ? »
Nous arrivâmes devant les distributeurs. Il passa un long moment à regarder ce qui lui était proposé, puis se retourna, collant son dos à la machine et lui donnant un grand coup de poing. Les infermières de la réception lui firent les gros yeux.
« Putain ! » s’exclama-t-il rageur, la mâchoire serrée.
Hé ! Ça va aller, ok ? Je suis sûr que tout va bien se passer. »
Il leva des yeux tristes vers moi, ce qui me brisa le cœur. J’avais mal pour lui. Je le pris une nouvelle fois dans mes bras. Je ne savais quoi faire d’autre que lui apporter un peu de chaleur humaine. Il s’agrippa à moi avec l’énergie du désespoir. Je passai une main dans ses cheveux, enroulant une de ses mèches autour de mon doigt. Sans m’en rendre compte, je humai leur parfum. Lorsque je réalisai ce que je faisais, je cessai immédiatement en espérant qu’il n’avait rien remarqué. Je me séparai de lui.
« On devrait y retourner, » fis-je pour cacher mon malaise.
Il acquiesça et glissa une main dans la mienne. Je n’eus pas le cœur de le repousser. Nous revîmes auprès de ses parents et j’entendis avec eux que les médecins sortissent de la salle d’opération. Je gardais la main de Roland, nos doigts entrelacés, jusqu’à qu’on vînt nous donner des nouvelles. L’attente dura plusieurs heures.
« Tu n’es pas attendu chez toi ? » me demanda le jeune homme alors que l’horloge indiquait vingt-et-une heures.
« Non. »
Je lui souris avec bienveillance. La porte qui nous séparait des salles opératoires s’ouvrit et nous nous redressâmes.
« L’opération c’est bien passé, » fit le chirurgien en ôtant sa calotte. « On a pu réduire l’hématome. »
Les parents de Roland soupirèrent de soulagement.
« Est-ce que ça veut dire qu’il va se réveiller ? » demanda la femme pleine d’espoir.
« Je suis désolé. Nous ne savons toujours pas ce qui a provoqué ce coma chez votre fils. Nous ne pouvons qu’attendre. »
La femme se jeta au cou de son mari et fondit en larmes. Je lâchai la main de Roland afin de lui caresser le dos. Il avait l’air dépité par la situation – ce qui n’était pas difficile à comprendre. Puis, au bout d’un moment, la petite famille décida de regagner leur demeure et je dis au revoir à mon nouvel ami.


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Basé(e) sur une oeuvre à lespetiteshistoiresdeloalann.blogspot.com.

10 commentaires:

  1. Je suis contente qu'on en apprenne un peu plus sur Roland. On ne connaissait de lui que son côté "allumeur" mais dans ce chapitre il apparaît comme un garçon fragile. Peut-être que ça fera craquer Benjamin.

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  2. Le mystère se dévoile de plus en plus dans le prochain chapitre. Un peu de patience, il sera bientôt en ligne et quand je dis bientôt, je veux dire aujourd'hui.

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  3. OoOoOoh de la bombe =)

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  4. OoOoOoh ouais. Je sais comment satisfaire mon public moi!!! Pas comme certaines dont je ne citerais me le pseudo...

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  5. Han O.O ! est ce que je dois me sentir visée ? critiquerais-tu ma vitesse de production ? ( certes pas très rapide ^^ )

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  6. Mais non, mais non, voyons! D'où peut bien te venir cette idée? :)

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  7. Des tréfonds de mon subconscient averti récemment de mon inspiration en déclin ( et toc ! =P )

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  8. Bon, ben, j'ai pas tout compris, donc on va dire que tu as gagné.

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  9. Tu sais que je viens de me rendre compte que je te postais des commentaires sur le chapitre 4 alors que je croyais que c'était le 8 ?

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  10. C'est pas grave, j'ai pas fait attention, moi non plus.

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