lundi 24 août 2009

Ma vie est vide sans toi (Fiction Yaoi) - Chapitre 01


Mot de l'auteur : Je voudrais dédier ce roman à ma mère (je sais c'est un peu bateau) qui, une fois n'est pas coutume (croyez-moi), a apprécié mon histoire et ma façon d'écrire, si bien qu'elle s'est prise au jeu de me corriger si nécessaire. Donc, je la remercie pour cela et je suis heureuse que pour une fois, ce que j'écris lui plaise.
Puis je voudrais aussi remercier ma lectrice Kyw` qui a corrigé toutes mes fautes d’orthographe, pour l’ensemble de mon œuvre.

François boutonnait sa chemise blanche devant son placard, ne remarquant pas les plaquettes de chocolat qui avaient commencé à s’estomper sous son abondante toison virile et les poignées d’amour qui commençaient à se former. Il prit une cravate à rayure rose et grise accrochée à la porte de son armoire qu’il ferma pour se contempler dans la glace en pieds comme chaque matin. Mais ce matin-là, son reflet l’affligea. Il retint un hoquet de stupeur. Il avait les traits tirés. Des rides creusaient son front à multiples endroits. Des pattes d’oies encombraient ses yeux qui se plissaient de fatigue malgré lui. De grosses poches violacées sous son regard gris clair paraferaient le portrait. L’image qu’il projetait lui fit peur, une image presque cadavérique[1]. Cela faisait trois mois qu’il ne dormait presque pas, se soumettant aux exigences de son amant. Il glissa sa cravate autour du cou sans prendre le temps de la resserrer et se précipita dans la salle de bain avoisinant sa chambre. Il ouvrit la pharmacie au dessus du lavabo et prit un tube d’anticernes. Il s’appliqua la crème. Il avait bientôt trente-neuf ans maintenant. Plus que jamais, il devait faire attention. Avant que Thomas n’entre dans sa vie et n’accapare toute son énergie, il allait fréquemment dans une salle de sport, non loin de chez lui, au moins deux fois par semaine. Aujourd’hui, il n’avait plus le courage d’y aller, ses ébats chroniques l’épuisant complètement et ça, il le devait à Thomas.
Alors qu’il se bornait à appliquer la crème qui semblait n’avoir aucun effet, François sentit des bras l’enlacer et un corps se coller à son dos.
« Tu viens. Le petit déj’ est prêt, » fit Thomas en l’embrassant sur la nuque.
« Ouais, j’arrive, » répondit-il en frottant plus énergiquement les cernes sous ses yeux.
Thomas quitta la pièce en lui lançant un dernier regard amoureux. François posa ses deux mains sur le lavabo et baissa la tête. Il voyait bien que s’acharner ne servait à rien. Il commençait à en avoir marre de tout ça. Il se laissa tomber sur le rebord de la baignoire où il s’assit. Son jeune amant l’épuisait et prenait de plus en plus de place dans sa vie. Il habitait pratiquement ici et François n’aimait pas ça. Il n’aimait pas qu’on le prive de son intimité, de son espace personnel, qu’on s’immisce dans sa vie avec force. Au bout d’un mois, Thomas avait déjà investit un tiroir de son armoire et François s’était trouvé très arrangeant sur ce coup là. Il n’avait rien dit. Mais alors qu’il regardait sa salle de bain, il commençait à regretter d’avoir laisser couler.
Une brosse à dent rose bonbon trônait à côté de la sienne, blanche transparente, sur le lavabo. En baissant la tête, il vit que le tapis de la salle de bain avait changé lui aussi. Son tapis beige en coton était remplacé par un immonde tapis bleu criard en fausse fourrure. La tête commençait à lui tourner. Où était son tapis ? Qu’en avait fait Thomas ? Et surtout, c’était quoi cette horreur ? Il s’accrocha au rideau de douche pour ne pas tomber. Il se tourna sur celui-ci et vit que lui aussi avait changé : un rideau transparent avec des poissons rouges qui flottaient à intermittence régulière. François se leva d’un bond et lâcha le rideau de douche comme s’il lui brûlait les doigts. Il avait envie de hurler.
Il quitta la salle de bain restant dans l’encadrement de la porte, lui donnant une vue globale de la chambre, cherchant ce qui avait été changé, déplacé, ajouté. Il se tourna vers la table de chevet du côté du lit où Thomas dormait toutes les nuits depuis trois mois et il y vit un cadre photo y pontifier sur la surface lisse en ébène. Il s’approcha du lit et prit le petit cadre d’une main pour y voir un couple de vieillards qu’il ne connaissait pas souriant avec Thomas. Il jeta le cadre sur le lit, dont les draps ne lui appartenaient pas. Ses habituels draps de soie noire avaient été échangés contre des draps de vulgaire coton imprimé d’un champ de fleurs. François leva les bras dans une question muette et prit son visage entre ses mains. S’en était trop ! Il fallait que ça s’arrête et maintenant ! Il se demanda comment Thomas avait pu faire tous ces changements sans qu’il ne s’en aperçoive. Mais il se rappela que son amant l’épuiser physiquement jours et nuits et qu’il traversait tous les jours son appartement comme un zombie.
Il entra dans le salon d’un pas calme et sûr de lui. Thomas leur servait de grandes tasses de café fumant. Il le regarda dans un sourire en le voyant entrer dans la pièce.
« Ça y est ? T’es prêt ? » demanda-t-il. « Attends. »
Thomas posa se qu’il avait dans les mains et s’approcha de son petit ami. Il lui resserra sa cravate et déposa un chaste baiser sur les lèvres. Ne voyant aucune réaction de la part de ce dernier qui le fixait de son air froid, il demanda :
« Ça va ?
Je pense qu’il faudrait qu’on fasse un break, » répondit François sans cesser de le fixer.
Il avait parlé sur le même ton qu’il utilisait lorsqu’il s’adressait à Thomas, un ton monocorde, sans véritable expression, comme s’il lui avait parlé du temps ou d’une autre banalité du genre. Thomas recula d’un pas et le regarda comme pour lui demander si c’était une blague. Ne voyant aucun changement chez François, il eut un sourire timide pour cacher sa peine. Son petit ami fit comme s’il ne voyait pas ce regard plein de tristesse qui lui était adressé.
« D’accord, » fit Thomas.
Il avait répondu cela comme si François lui avait proposé d’aller faire des courses ou de regarder la télévision. Lui aussi savait se montrer impassible quand il le fallait. Il regagna la chambre et sortit un grand sac de sport de l’armoire. Il s’appliqua à ramasser ses affaires qui se trouvaient dans la chambre et dans la salle de bain. Il savait que ça finirait comme ça. François n’était pas le genre de type à s’engager. Cela faisait trois mois qu’ils étaient ensembles et tous les soirs, Thomas s’efforçait de satisfaire son amant pour que celui-ci ne se lasse pas de leur routine, ou pire, aille voir ailleurs. Passant toutes ses nuits dans son lit, il devait se trimballer son sac de sport tous les jours pour avoir des affaires de rechange. Une nuit, après leurs ébats, alors que deux mois s’étaient écoulés depuis qu’ils sortaient ensemble, Thomas allait rentrer chez lui car il n’avait plus rien à se mettre de propre pour aller au boulot le lendemain, quand François l’avait surpris en lui disant qu’il pouvait utiliser un de ses tiroirs et la machine à laver dans la buanderie quand il le désirait. Ces mots, venant de son amant qu’il connaissait comme ne supportant pas que l’on empiète sur son territoire, l’avaient profondément ému et y avait vu le signe d’une invitation à entrer dans sa vie pour une durée indéterminée. Sur l’euphorie du moment, il était resté et ils avaient encore fait l’amour.
Mais il avait remarqué que ces derniers jours, François avait changé. A chaque geste d’affection auquel Thomas se risquait, François devenait de plus en plus froid, s’éloignant un peu plus de lui. Il savait ce qui allait finir par se passer mais ne voulait pas se l’avouer. Et ce matin-là, alors qu’il ne s’y attendait pas, le couperet était tombé. François voulait qu’ils fassent un break, une autre manière pour dire qu’il voulait rompre. Thomas le savait. D’ici quelques jours, il recevrait sans doute un appel de François pour lui dire que tout était fini et que c’était inutile d’attendre plus longtemps.
Une fois toutes ses maigres affaires rassemblées dans son sac, il regagna le salon, le traversa et entra dans la buanderie pour récupérer les derniers vêtements sales qui restaient dans l’appartement. Il entra à nouveau dans le grand salon à la décoration moderne tout droit sortie d’un magasine de déco et se dirigea vers la porte d’entrée, sans même lancer un regard à François, assis à la table du salon entrain de prendre son petit déjeuner.
« Tu ne déjeune pas ? » demanda-t-il en se tournant vers Thomas qui s’apprêtait à ouvrir la porte.
Sans se retourner, ce dernier vit du coin de l’œil François qui le regardait l’air surpris. Thomas ouvra la porte et la referma derrière lui, non sans ajouter dans un murmure :
« J’ai plus faim. »
François se replaça sur sa chaise faisant face à son petit déjeuner, bu son café, appréciant le calme retrouvé de son appartement. Lui qui n’était pas du matin, devait, tous les jours, supporter les discours à rallonge de Thomas sur ses agissements de la veille. Il connaissait tout de ces problèmes de boulot, de son patron insupportable et inculte, de ses collègues de bureau plus stupides les uns que les autres et de ses clients toujours mécontents. Alors qu’il s’enivrait du silence renouvelé, François ne cessait d’entendre la voix de Thomas dans sa tête se plaignant sans cesse. Il secoua la tête pour chasser l’intrus qui s’y était logé et sourit en se rappelant le rire que Thomas aurait eu s’il avait été là. S’il y avait bien quelque chose qui allait lui manquer avec l’absence de son amant, c’était son rire, ce rire enfantin, joueur, cristallin. François se rappela que c’était la première chose qu’il avait attiré chez lui, son rire. À ce souvenir, son cœur se serra.
Ne sachant pas ce qui lui arrivait ou ne voulant pas le savoir, il se leva, débarrassa la table et jeta les restes du petit déjeuner amoureusement préparé par Thomas avant de mettre les tasses dans le lave-vaisselle. Il enfila la veste de son costume trois pièces de grands couturiers, ramassa sa sacoche de cuir noir qu’il avait posé à côté du canapé la veille, prit son manteau sous le bras et sortit de cet appartement qui lui semblait bien vide tout à coup.

Il était vingt-et-une heure passée quand François rentra chez lui, épuisé. Il ouvrit la porte de son appartement avec appréhension s’attendant à voir débouler Thomas comme une furie, se plaignant de l’heure tardive à laquelle il rentrait. François fut surpris de voir son appartement plongé dans le noir. Puis il se souvint des évènements du matin même. Il s’appuya sur l’encadrement de la porte avec un sourire et se dit qu’il avait bien fait. Il n’aurait pas supporté une crise de son amant ni les ébats qui auraient suivit inévitablement leur dispute.
Sans même allumer le plafonnier, François entra dans le salon de luxe en fermant la porte d’entrée derrière lui. Comme tous les soirs, il posa son manteau au porte-manteau, sa sacoche à côté du canapé, sa veste sur une des chaises du salon et regagna sa chambre. Là, il se déshabilla, prenant soin de plier ses affaires et s’affala sur son lit dans toute sa largeur. Il allait enfin pouvoir dormir. Alors qu’il commençait à se détendre, quelque chose le dérangea. Il fit glisser ses mains sur son lit et remarqua que le contact n’était pas celui d’un coton rugueux. Il se tourna vers la table de chevet pour allumer une petite lampe design et regarda le lit. Ses éternels draps de soie noire étaient de retour. Quand Thomas avait-il changé les draps ? Ce matin, alors qu’il faisait son sac ? Ou était-il repassé plus tard dans la journée ? Non, ça devait être ce matin car François avait remarqué que son amant avait laissé le double de la clé sur le petit meuble de l’entrée.
François se leva et alla dans la salle de bain. La brosse à dent rose avait disparu, le tapis de bain était redevenu beige et les poissons rouges s’étaient envolés. François sourit. C’était mieux quand même ! Il retourna dans sa chambre, se glissa sous les draps, éteignit la lampe de chevet et s’endormit.
Le lendemain, c’est un François bien reposé et en pleine forme qui se réveilla. Il éteignit son réveil et resta au lit quelques minutes, les yeux grands ouvert profitant de sa bonne humeur. Il se sentait bien. Il remarqua que dans son sommeil, il s’était blottit sur le côté droit du lit comme pour laisser le gauche à Thomas pourtant absent. Il ria intérieurement de son réflexe pavlovien et finit par se lever. Il prit une douche, se brossa les dents, regarda son reflet qui avait meilleure mine après une bonne nuit de repos et en passant une main sur son torse velu, fut surpris de constater que les tablettes de chocolat, dont il aimait se venter, avaient presque disparu. Il retourna dans sa chambre pour se détailler dans le miroir de plein pied de son armoire et fut peiné de constater que, en plus d’avoir perdu ses abdos, des poignées d’amour s’étaient encrées sur ses hanches. Les bons petits plats de Thomas avaient eu raison de sa musculature qu’il avait toujours entretenu jusque là. Ayant soudain peur, il laissa tomber la serviette qu’il avait attachée autour des hanches en sortant de la douche et se retourna pour regarder ses fesses. François ne put s’empêcher de pousser un soupir de soulagement en voyant qu’elles étaient toujours aussi musclées. Au moins, ça il ne l’avait pas perdu !
En s’habillant, François se dit qu’il retournerait à la salle de gym sans attendre, qu’il était temps de reprendre ses anciennes activités. Il entra dans le salon et fut surpris de ne pas voir le petit déjeuner sur la table. Il se rappela l’absence de Thomas. Mais pourquoi n’arrive-t-il pas à s’y faire ? Ces trois mois de presque vie commune avaient eu raison de lui et il s’était habitué à la présence de son amant. Mais François ne regrettait pas pour autant son choix. Il se disait que c’était un cap à passer, que tout redeviendrait comme avant dans peu de temps, une fois les premiers jours passés. Puis, sûr de lui, il savait que Thomas ne tarderait pas à appeler pour prendre de ses nouvelles et le supplierait de le reprendre. Alors François pourrait instaurer de nouvelles règles, repartir sur de nouvelles bases, c’était son but. Il pouvait tout aussi bien couper les ponts avec Thomas, se trouver un nouvel amant moins envahissant mais cette perspective ne l’enchantait guère. Il n’avait plus vingt ans et partir à la chasse de l’homme parfait ne lui disait plus rien.
François prit un simple café noir pour petit déjeuner, rassembla ses affaires, n’oubliant pas son sac de sport toujours prêt à l’emploi et partit pour une autre journée de travail.


Plusieurs jours étaient passés depuis l’annonce du break et Thomas n’avait toujours pas donné signe de vie. François ne pouvait pas se permettre de l’appeler s’il voulait que son plan fonctionne. Rentré chez lui, il écouta les messages sur son répondeur espérant entendre la voix de son amant mais toujours rien. En revanche, la mère de François n’arrêtait pas de lui laisser des messages, tempêtant contre son fils qu’elle ne voyait pas assez souvent à son goût et le suppliant de venir à un déjeuner le dimanche suivant avec son petit ami, s’il le souhaitait.
François posa ses affaires et se servit un verre de whisky sans glace. Il s’affala dans le canapé et alluma la télévision. Que se passait-il ? Pourquoi Thomas ne s’était toujours pas manifesté ? Contrairement à ce qu’il pensait, il n’arrivait toujours pas à se faire à l’absence de son amant. Il s’imaginait toujours le voir endormit à ses côtés lorsqu’il se réveillait, le petit déjeuner sur la table lorsqu’il sortait de la chambre et un sourire chaleureux l’accueillant alors qu’il rentrait du boulot. Mais il en était rien. Maintenant qu’il était en pleine forme, qu’il avait presque retrouvé sa musculature, même ses ébats amoureux et les tendres caresses qui suivaient lui manquaient énormément. Mais que faisait donc Thomas ? Pleurait-il encore, prostré dans son lit ? Ou… s’était-il trouvé un autre mec ? Un mec qui l’accepterait dans sa vie sans condition aucune et avec un sourire amoureux ? Un mec qui aimait tellement le sexe que l’endurance de son amant ne lui faisait pas peur ? Non ! pensa François balayant cette idée d’un revers de main. Ce n’était pas possible. Pas son Thomas. Il était trop amoureux de lui pour aller voir ailleurs et ce, même s’il avait de grands besoins à satisfaire. Thomas ne pouvait pas faire ça.
Bien qu’il essayât d’en faire abstraction, cette pensée insidieuse s’était insinuée en lui pour frapper là où ça faisait mal. La colère commençait à lui monter à la tête alors qu’il imaginait son amant dans les bras d’un autre homme. Il avait envie de le voir. Ça commençait à l’obséder. Il éteignit la télévision finissant son verre et alla se coucher. Une bonne nuit de sommeil l’empêcherait de ressasser ces idées noires et peut-être que Thomas finirait par l’appeler enfin. Mais François n’arrivait pas à dormir. Il tournait et virait dans son lit qu’il trouvait trop froid. Les images d’un Thomas en pleine extase sous les caresses d’un autre homme le tourmentaient. Ce ne fut qu’au petit matin qu’il regagna les bras de Morphée à défaut de ceux de son amant et ce pour ne dormir, en tout et pour tout, qu’une heure avant que son réveil ne sonne.


[1] Ne vous inquiétez pas, il n’est pas malade, juste fatigué.


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Ma vie est vide sans toi by LoalAnn est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité-Pas d'Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France.
Basé(e) sur une oeuvre à lespetiteshistoiresdeloalann.blogspot.com.

3 commentaires:

  1. vachement bien écrit, ça donne envie de lire la suite...

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  2. Merci et j'espère que la suite te plaira

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  3. Ce qui est super avec toi, c'est que les histoires varient vraiment =) Et l'avantage de les lire maintenant c'est que je peux savoir la suite rapidement ^^

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