lundi 28 septembre 2009

Et vous ?... (Fiction Yaoi) - Epilogue


« Cela fait trois ans que je vous raconte ma vie et vous n’êtes toujours pas décidé à vous réveiller on dirait. »
Assis sur un tabouret, dans une chambre d’hôpital, Loïc tenait la main d’un jeune homme endormis. Seul le bruit des machines auxquelles ce dernier était relié envahissait la petite pièce blanche qui manquait de luminosité. Le spectacle était triste à voir. Aucune décoration, aucun bouquet de fleur ne marquait la présence d’un quelconque attachement au jeune homme. Il semblait si seul et si fragile allongé sur ce lit. Loïc trouvait cela affligeant. La vie manquait à cette chambre. Comment pouvait-il avoir envie de se réveiller alors que personne ne semblait l’attendre à part Loïc, bien sûr ?
« Je vous ai raconté tous mes malheurs, tous mes instants de bonheur et je ne connais toujours rien de vous. Vous êtes si jeune, dit-il en passant une main sur les cheveux rasés du jeune homme. Je suis sûr que vous manquez à quelqu’un. Il serait temps de vous réveiller maintenant.
- Tu es encore là Loïc ? »
L’appelé se retourna et vit la jeune infermière de bloc prénommait Myriam entrain d’écrire des notes sur le dossier du patient. Loïc lui sourit.
« Comment c’est passé la dernière intervention ? » demanda-t-il.
« Sans complication. Mais tu sais s’il ne se réveille pas ça ne servira à rien. Ça fait cinq ans qu’il est là maintenant et même sa famille ne vient plus le voir. Tu es le seul à rester à son chevet.
- Je sais.
- Et ce n’est même pas sûr qu’il t’entende.
Je sais. Mais il me rappelle mon frère. Il a l’air si fragile et si seul, je n’arrive pas à le laisser. »
Loïc se tourna vers le patient et lui serra la main comme pour lui signifier qu’il n’était pas seul. Il ne savait pas pourquoi mais depuis qu’il avait intégré cet hôpital, il n’arrivait plus à se détacher de cette chambre. Tous les jours avant de quitter son travail, il passait au moins une heure avec cet inconnu, essayant de le réconforter. Ou peut-être était-ce lui-même qu’il essayait de réconforter ? Après tout, il ne savait rien de ce qu’il se passait dans la tête de cet étranger. Cependant, il espérait que ses fréquentes visites le rattachaient au monde des vivants et lui apportaient le courage de se battre et de se réveiller. Mais voilà trois ans qu’il venait le voir tous les jours, même lorsqu’il était de repos – au grand damne de son compagnon – et son état n’avait toujours pas évolué. Voilà quelques jours, le patient avait même du subir une nouvelle intervention car son cerveau saignait.
Loïc ne savait plus quoi faire pour l’aider mais il ne pouvait se résigner à abandonner. C’était pour cela qu’il était devenu aide soignant. Il voulait aider les gens quoi qui lui en coûtât. Même s’il devait passer le reste de ses jours au chevet de ce malade à lui faire la conversation, il le ferait.
« Dis ! » intervint Myriam, le sortant de ses pensées. « Tu n’avais pas changé ta garde avec Josiane pour partir plus tôt aujourd’hui ?
Oui, pourquoi ? Quelle heure il est ?
Vingt heures passées.
Merde ! » fit-il en se levant précipitamment. « Je vais me faire tuer.
- C’est pour une occasion spéciale ?
- Oui. Gaëtan et moi fêtons nos vingt ans de vie commune.
- Vingt ans ? Ouah ! La plupart des couples hétéro ne tiennent même pas jusque là de nos jours.
- Je sais. Mais quand on aime on ne compte pas les années.
- Arrêtes ! Tu parles comme ma grand-mère. »
Loïc rit à la plaisanterie de sa collègue.
« Et qu’est-ce que vous avez prévu pour l’occasion ? » demanda-t-elle.
« Dîner aux chandelles à l’Hôtel Imperium.
- Attends. C’est un hôtel quatre étoiles ça non ?
- Oui. Et Gaëtan m’a même fait la surpris de louer une suite pour le week-end.
- La surprise ?
- Je concierge a appelé pour confirmer la date. Il est tombé sur moi. Mais je sais très bien avoir l’air surpris. Ça devrait aller. Ceci dit, il faut vraiment que j’y aille. Je suis en retard.
- Oui. Vas-y et amuse-toi bien. »
Ce fut à cet instant que le visage de Gaëtan passa par la porte. Il avait vieilli mais ses cheveux poivre et sel et ses yeux bleus de plus en plus clair le rendaient plus beau de jour en jour.
« Quand je ne t’ai pas vu arriver, je savais que je te trouverai ici, » fit le nouvel arrivant.
« Tu me connais trop bien, » répondit Loïc en s’approchant de son compagnon afin de l’embrasser.
Gaëtan l’enlaça à son tour. Malgré toutes ces années passées, la passion était toujours aussi vive. Bien qu’ils eussent tout deux cinquante ans passés, leurs ébats étaient toujours aussi fréquents. L’amour ne s’était pas atténué avec l’âge, bien au contraire. Loïc avait l’impression que son désir pour son amant grandissait de jours en jours et bien évidemment, ce dernier pensait la même chose à son égard. Ils étaient aussi amoureux qu’au premier jour.
Depuis ce fameux dimanche, il y avait environ vingt ans, après dix ans de séparation, ils s’étaient enfin retrouvés et décidèrent de ne plus jamais se quitter. Loïc avait dû retourner sur Nice une fois le soir venu et il était parti sans même demander à Gaëtan quand il le reverrait même s’il en mourrait d’envie. Ce jour-là, Loïc s’était dit que c’était l’épilogue à leur histoire, la conclusion dont il avait besoin pour passer à autre chose. Mais au courant de la semaine qui suivit, il eut la surprise de voir Gaëtan frapper à sa porte. Pour ce dernier, il ne semblait que ce fut la fin mais plutôt le commencement de leur nouvelle histoire.
La même semaine, Gaëtan aménagea avec lui. Gaëtan n’eut aucun mal à trouver du travail en free-lance à la hauteur de ses compétences. Ils avaient continué leur vie en tant que couple solide. Bien sûr, il leur arrivait de se disputer mais les conflits ne duraient pas longtemps et ils prenaient le parti de ne jamais se coucher fâchés. Ainsi, ils pouvaient à ce jour fêter leurs vingt ans de vie commune, plus heureux que jamais.
« Salut, Myriam, » fit Gaëtan à l’infirmière s’en pour autant cesser l’enlacer son compagnon. « Ça t’ennuis si je l’enlève ? »
Gaëtan venait souvent cherche Loïc à son travail, ou lui rendait visite lorsque ce dernier avait de longue garde, notamment de nuit. Il avait, par conséquent, pu rencontrer tous les collègues de travail de son amant et s’était lié d’amitié avec certains d’entre eux.
« Non, vas-y, » répondit-elle en souriant. « Et amusez-vous bien.
- Ne t’inquiète pas pour ça. C’est prévu, » dit Gaëtan. « J’ai même prévu une surprise.
- Une surprise ?! » s’exclama Loïc les yeux pétillant tel un enfant un matin de Noël.
« Ok ! Tu es déjà au courant ? » fit Gaëtan en se détachant de son compagnon.
« Quoi ? Je n’étais pas convaincant ? Myriam ?
- Non. Je t’ai trouvée très convaincant, moi. Je ne sais pas comment il a fait pour s’en rendre compte.
- Ça fait plus de trente ans que je te connais, » répondit Gaëtan. « Je sais quand tu simules ou pas.
- Tous les hommes disent ça, » plaisanta la jeune infirmière. « Mais tu es la première que je crois. »
Les deux hommes sourirent à la jeune femme.
« Bon, » intervint Gaëtan. « Il faut vraiment qu’on y aille. J’avais réservé pour vingt heures et il est déjà la demie.
- Je te suis. »
Sur ces mots, les deux hommes quittèrent la pièce après avoir dit au revoir à la collègue de Loïc. Myriam finit d’inscrire les dernières informations sur le dossier du patient avant de le placer au pied du lit. Puis, elle quitta à son tour la chambre qui se retrouva plongée dans le noir. Un silence pesant régnait dans la salle où l’on ne pouvait qu’entendre le bruit des machines. Tout le lieu semblait hors du temps. Tout était figé autour de ce jeune homme allongé sur son lit dont la poitrine se levait et se baissait au rythme de sa respiration. Les voix pleines de vie des trois individus qui avaient quitté la pièce semblaient encore résonner entre ces quatre murs tel un écho lointain. Combien de temps s’était écoulé depuis qu’ils étaient partis ? Quelques minutes ? Des heures ? Des jours ? Des mois peut-être ? Le temps n’était plus quantifiable dans cet endroit sans vie.
Puis, soudain, un gémissement déchira le silence environnant. Les paupières du patient papillonnèrent puis s’ouvrirent avec difficulté. Où était-il ? Que c’était-il passé ? Depuis combien de temps était-il ici ? Quelle était cette douleur qui alourdissait tout son être ? Où était la voix qu’il avait entendu dans son sommeil ? Tant de question se bousculaient dans l’esprit du jeune homme. Ça y était, il était réveillé et une seule phrase résonnait à son esprit sans qu’il ne pût l’expliquer. Elle apparaissait comme un lointain souvenir. Et cette voix qu’il ne reconnaissait pas, comme émergeant d’un rêve. Ces deux mots qui tournaient et tournaient dans sa tête et attendaient une réponse : « Et vous ?... »


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Basé(e) sur une oeuvre à lespetiteshistoiresdeloalann.blogspot.com.

16 commentaires:

  1. l'epilogue... super!! je me demandai à qui était adressé le fameux 'et vous?"..
    superbe histoire !!

    continue comme ca !! j'adore !

    tam

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  2. Et bien, il s'agit du jeune homme dans le coma. Loïc lui parle comme s'il pouvait lui répondre même si ce n'est pas le cas.
    Je pensais pourtant que c'était évident. Tu es le(la) premier(e) à me demander ça.
    Penses-tu que mon épilogue demande un ajustement par rapport à ça?

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  3. non désolée si je me suis mal exprimée !! justement c'est avant l'épilogue que je me posais la question !!! c'est pour ca que j'ai dit que je trouvais l'épilogue super !!c'était pas ironique !! bien au contraire !! tout s'y met en place !
    ne change rien !! continue !!

    tam

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  4. Merci pour ton soutien et j'espère que tu continueras à me lire

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  5. Magnifique histoire. Elle fait rire et pleurer. On vibre du début à la fin. On tremble pour les personnages.

    J'ai aimé la manière dont elle fini. C'est mieux que "ils vécurent heureux jusqu'à la fin des temps".

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  6. Merci de m'avoir lu et je suis contente que ça te plaise. Ceci dit, j'ai débuté la rédaction du tome 2 de Et Vous?... dont j'avais parlé et ce n'est pas facile. Je pense que je le posterai en fin de semaine, comme d'habitude, si je ne croule pas sous le boulot. Ou alors, ce sera autre chose. Je ne sais pas encore. Suspense...

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  7. Coucou,je passais par hasard (j'avais envie de lire une bonne fic yaoi et je n'ai aps été déçu)
    et donc,j'ai lu breèvement tes fics et je trouve qu'lles sont trrès très bien écrite.
    Et j'aime particulièrement celle-la parce que comme l'infirmière ,je me nomme aussi Myriam ^_^
    félictation et bonne continuation =)

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  8. Merci beaucoup, ça fait plaisir d'être lue et appréciée. Reviens me voir quand tu veux. Tu es la bienvenue.

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  9. Juste pour dire que j'ai relu cette histoire il n'y a pas longtemps et je la trouve toujours aussi géniale ! Une de mes préférées ! Continue à écrire ^^

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  10. Si tu vas même jusqu'à lire mes histoires deux fois, ouah, j'en ai les larmes aux yeux (ou peut-être est-ce la fumée de cigarettes). Enfin, bref, merci. Ça fait vraiment plaisir et je suis ravie aussi de faire ta connaissance.

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  11. Wha ! L'épilogue est vraiment classe , il en jette !
    Pour le coup ça m'a vraiment surprise ! Je pense que je vais le ressasser pendant hypra longtemps ...
    Génial l'idée du malade ! Et superbe histoire !

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  12. Magnifique histoire trop pleurer lors de leur dernière étreinte quand loïc a compris que c'était la fin de leur histoire et en bref je n'ai fait que pleurer et rire aussi. C'est une histoire tellement belle et si bien narrer. Magnifique vraiment j'ai adorer. Continue comme ça j'adore.
    Biz de Céline

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  13. Je suis ravie d'un tel enthousiasme. Je ne savais pas que mon histoire pouvait suscité autant d'émotions. Ça me comble de joie. Merci beaucoup pour ton commentaire, plus que flatteur.

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  14. Punaise, j'adore. J'aaadore!! ** J'ai passé toute l'après-midi à lire ton histoire. J'étais totalement captivé, accroché aux mots.

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  15. Je suis tombé par hasard sur tes récits. Et ce que j'en tire c'est que tu écris magnifiquement bien! Tu arrives à plongé le lecteur dans tes histoires, à lui faire vivre, à ressentir l'émotion de tes personnages! J'ai ris, pleuré en même temps qu'eux. Continue tu as un réel talent. J'ai lu la totalité des récits sur ton blog et aucun ne ma laissé indifférent. C'est vraiment beau surtout celui ci ainsi que sa suite. Continue et encore félicitations.

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